L’Agro Bio-Tech de Gembloux (GxABT), antenne de l’Université de Liège est un des partenaires du projet LIFE in Quarries. 


Depuis plus de 150 ans, la faculté de Gembloux Agro-Bio Tech enseigne les domaines des sciences du vivant et de l’ingénierie biologique à des générations d’élèves.

Palais abbatial © Quanah Zimmerman, par Gembloux AgroBioTech

Intégrée à l’Université de Liège (ULg) depuis le 1er octobre 2009, Gembloux Agro-Bio Tech développe des formations et des projets de recherche fondamentale et appliquée dans les domaines de Bio-ingénierie appliquée aux productions animales, végétales et microbiennes, à l’Innovation technologique pour la conversion des bioressources, et à la modélisation et gestion/restauration des socio-écosystèmes terrestres et de leur biodiversité.

Focus sur ce partenaire universitaire du projet Life in Quarries.

 

Aux portes de la Hesbaye (région naturelle de Belgique répartie sur 5 provinces différentes), à Gembloux, le site de 130 hectares (dont 17 hectares boisés) accueille aujourd’hui 1 491 étudiants et 419 membres du personnel académique, scientifique, administratif et technique.

 

Actuellement, GxABT compte l’unité facultaire de recherche TERRA, 4 centres d’appuis à la recherche et à l’enseignement (dans les domaines de l’agriculture, l’environnement, la transformation alimentaire, la forêt et les milieux naturels), une plateforme dédiée à l’agriculture et la biodiversité en milieu urbain et onze unités de recherche.

par Gembloux Agro Bio-Tech, le nouveau site TERRA

 

Quelles sont les spécificités de l’unité de recherche Biodiversité et Paysage de GxABT ?

 

Créé en 2010, les actions menées par l’équipe de ce département s’articulent autour de 3 pôles principaux.

La recherche

L’équipe développe des projets de recherche fondamentale et appliquée, ainsi que des actions de sensibilisation dans les domaines de l’étude, de la conservation et de la gestion de la biodiversité, de la gestion des invasions biologiques, de l’écologie fonctionnelle et évolutive, de l’évaluation intégrée des services écosystémiques et de l’écologie du paysage. Elle est active tant en milieu tempéré qu’en milieu tropical. Ces projets sont réalisés dans le cadre de l’Unité de Recherche TERRA.

L’enseignement

L’équipe Biodiversité et Paysage assure les enseignements d’écologie générale, sur l’étude, la conservation et la gestion de la biodiversité, sur l’ingénierie écologique, sur l’évaluation des services écosystémiques, sur l’écologie urbaine et sur l’écologie des paysages.

Les services

L’unité Biodiversité Paysage remplit également la mission de « service à la société ». Grâce à son expertise pointue, elle appuie de nombreux acteurs de la société dans des projets liés à la gestion de la biodiversité : autorités publiques (Services Publics Wallons, Communes, Provinces), secteurs privés (secteur extractif, promoteurs immobiliers, …), bureaux d’études (environnement, urbanisme, architecture du paysage, ONG, …

Partenaire du projet Life in Quarries depuis ses premières heures, nous avons rencontré Grégory Mahy, professeur académique à GxABT afin de dresser le bilan des dernières années.

Pour lui c’est clair, si c’était à refaire : il re-signe !

Grégory Mahy lors de son interview par Skype pour cet article

Comment êtes-vous rentrés dans le projet LIFE in Quarries ?

 » C’est une combinaison de plusieurs facteurs.

En premier, c’est lié à la nature même de notre unité Biodiversité et Paysage dans laquelle nous faisons de la recherche fondamentale mais nous cherchons, également, à ancrer nos actions sur le terrain via de la recherche appliquée. Notre but est d’aider des acteurs de la société qui sont confrontés à des problématiques réelles sur le terrain liées à la biodiversité.

De plus, l’unité de recherche Biodiversité et Paysage avait déjà participé à plusieurs projets LIFE. Nous entretenons, donc, des liens privilégiés avec l’administration qui nous fait confiance et connait notre expérience. »

Maxime Séleck de GxABT et Alexandre Sneessens, ancien coordinateur du projet Life in Quarries, en pleine discussion sur le terrain.

 » L’opportunité de rejoindre le projet Life in Quarries s’est présentée lors d’une réunion avec le Département de la Nature et des Forêts (DNF) concernant le programme de formation des « Mrs et Mmes Biodiversité » (ndlr : une initiative de FEDIEX (la Fédération de l’industrie extractive de roche non-combustible), instigatrice du projet Life in Quarries).  Le but de cette formation était (et est toujours) de former les participants, issus du personnel des carrières en activité, aux principes de bonne gestion de la biodiversité sur leur site. Au total, depuis le début de ce programme, je pense que nous avons formé une soixantaine de personnes…

La demande est vraiment venue du monde carrier.

Ces formations ont vraiment permis de bâtir une relation de confiance (et il faut absolument prendre le temps de bâtir cette confiance à travers un dialogue commun et permanent) avec les carrières. Et, au fur et à mesure des années qui passaient, nous sommes passés de formations plus « générales » à des formations « spécialisées » car les questions des participants évoluaient. Il y avait l’envie d’aller « plus loin »… et l’idée d’un projet LIFE a émergé. Nous avons alors rédigé le projet à la demande de et en collaboration avec FEDIEX.

Au final, nous étions « juste » à une réunion pour discuter de l’élaboration d’une formation et après plusieurs années de collaboration, nous avons débouché sur la rédaction d’un projet LIFE. »

L’initiative de ces formations s’inscrit dans le cadre de la charte sectorielle « carrières et biodiversité » de FEDIEX

 » Par ailleurs, nous avons mené, pendant plus de 10 ans, un programme en faveur de la gestion de la biodiversité (lié à des espèces endémiques, à des situations de destruction complète, etc.) sur des sites miniers en République Démocratique du Congo.

Ce programme nous a déjà permis d’acquérir de l’expérience dans ce domaine, expérience qui nous a apporté beaucoup car elle nous a permis de construire toute une compétence scientifique en gestion de la biodiversité, là-bas, et de mettre au point des outils de transfert vers les acteurs (dans ce cas-là, des multinationales).

Le projet Life in Quarries était l’occasion parfaite de transférer cette expertise ici, en Région wallonne et, justement, nous cherchions à nous impliquer dans un nouveau programme LIFE. »

Une partie de l’équipe de GxABT à côté d’une mare temporaire sur un site extractif en activité

 

Que retirez-vous de votre participation au projet ?

« En terme institutionnel, des projets de ce type sont extrêmement importants pour notre enseignement et notre formation. Nous sommes une faculté d’ingénieurs et ce sont ce genre de projets qui, à mon sens, permettent de mieux comprendre et identifier les besoins sociétaux auxquels nos étudiants devront répondre. Ça rend nos formations plus pertinentes et plus riches, aussi, grâce aux possibilités de visites, de stages, de TFE, etc. C’est une immersion dans la réalité de terrain. »

Faculté © Jean-Louis Wertz, par Gembloux AgroBioTech

« Au point de vue de notre antenne de recherche, il s’agit clairement d’un projet majeur. Un projet d’une telle ampleur, à l’échelle régionale, sur 26 sites, nous a apporté une réelle visibilité nationale et internationale, tant au niveau du monde carrier qu’au niveau de l’administration (nous sommes, notamment, régulièrement invités en France, par le ministère de l’environnement, pour présenter des exposés sur la nature temporaire) et au niveau académique où il fait figure de projet phare.

Enfin, au point de vue de notre équipe, je crois réellement que cette expérience nous a fait mûrir dans notre approche des problématiques liées à la biodiversité et dans notre réflexion sur les enjeux et projets qu’on veut développer à l’avenir.  Nous n’avons plus la même vision, aujourd’hui, sur la façon de faire pour passer de la théorie à la pratique. »

Coronelle lisse (Coronella Austriaca), photo prise par Maxime Séleck de GxABT

 » Personnellement, ce que m’apporte ce type de projet c’est une motivation à continuer mon travail, qui n’est pas toujours facile (puisqu’on est confronté à des situations environnementales problématiques et parfois très extrêmes).

Mais, ici, quand on voit le dynamisme et l’appropriation qui s’est opéré au niveau des acteurs et de l’ensemble des personnes qui ont participé ça me met vraiment du baume au cœur et ça donne envie de continuer ce genre de projet.

D’autant plus quand on est pas directement dans la conservation de la nature. Je ne vais pas souvent sur le terrain mais quand je vois les photos qu’on me rapporte, quand je vois un ouvrier à côté d’une Coronelle lisse (coronella austriaca) ou fier d’avoir contribué au développement de la biodiversité en creusant une mare, ça me rend heureux et ça me pousse à continuer. À avancer. »

Il faut vraiment que les acteurs soient au cœur de ce programme, qu’ils soient actifs et impliqués. Pour moi, arriver à impliquer les acteurs et voir leur motivation c’est une condition indispensable et entièrement complémentaire aux réglementations. »

Si c’était à refaire : je re-signe !

La notion de service écosystémique, au cœur de votre implication ?

 » Non, en tout cas ce n’était pas l’idée de départ. Nous sommes vraiment orienté biodiversité, conservation d’espèces et conservation d’habitats.

par Gembloux Agro Bio-Tech

Cependant, il est apparu, pendant le projet, que cette notion était, en fait, un élément central. Il faut savoir que notre partenariat avec les carrières s’avère extrêmement original pour la Commission européenne car la notion de Services Écosystémiques (SE) fait l’objet de beaucoup de littérature « théorique » mais personne ne s’était, jusque-là, vraiment investi de façon complète dans l’application de cette notion.

Les SE sont définis comme les bénéfices que les sociétés humaines tirent des écosystèmes. Donc les écosystèmes remplissent des fonctions. Ils peuvent fixer le carbone, l’azote, ils régulent le cycle de l’eau et/ou la biomasse… Ils fournissent également des opportunités esthétiques, artistiques, etc. et toutes ces fonctions fournissent des bénéfices aux activités humaines. »

 

 Et donc au fur et à mesure du projet c’est une notion qui a pris de plus en plus d’ampleur jusqu’à devenir une partie à part entière dédiée à l’évaluation des SE « pour eux-mêmes » à l’échelle d’une carrière et pas seulement d’évaluation des impacts des actions du projet Life in Quarries sur les SE.

C’est un peu la valeur ajoutée de ce genre de projet : il y a des surprises et on va parfois plus loin que ce qui était prévu à la base. Concernant les SE ça a été une très belle opportunité de tester nos concepts dans un cas réel. »

D’après vous, quelles sont les forces du projet LIFE in Quarries ?

Campanule, photo prise par Maxime Séleck de GxABT

Partenariat 

Esprit positif

Volonté

 Moyens financiers (sans le programme LIFE on ne l’aurait pas fait).

 

Un autre apport du projet est la création de la plateforme AMBREs

 » Si on veut qu’un projet comme celui-ci fonctionne, il faut que les experts transfèrent leurs compétences et leurs responsabilités aux acteurs de terrain. Si les experts restent au cœur du projet, cela annihile toute chance d’autonomie et d’appropriation par les carriers. »

 » C’est vraiment une autre conséquence positive du projet : le développement dans notre équipe de compétences pour penser et créer des outils de gestion simples, interactifs et intuitifs pour des acteurs qui ne sont pas des spécialistes de la biodiversité. Comme avec la plateforme AMBREs, une plateforme en ligne dédiée à la gestion des actions en faveur de la biodiversité réalisées dans le cadre du projet Life in Quarries. »

Quel avenir voyez-vous pour les actions du projet LIFE in Quarries ?

 » L’espoir c’est que le secteur se soit réellement emparé de la gestion de la biodiversité sur leur(s) site(s), qu’on ait démontré que c’était faisable (notamment pour la nature temporaire dans le cadre de l’activité d’extraction) et que, donc, le secteur continue de façon durable et autonome ces bonnes pratiques de gestion. »

 Abeille sauvage sur talus sableux, photo prise par Maxime Séleck de GxABT

 

 » L’espoir, aussi, c’est que cela aille « au-delà » de la simple perpétuation des actions. Par-là, j’entends que le renforcement du partenariat avec les administrations puisse se poursuivre pour aller plus loin et pour servir d’exemple à d’autre secteurs. Pour que la suite de ce projet se fasse dans le même type d’esprit, et donc c’est avoir l’opportunité de valoriser cette expérience pour la transposer à d’autres secteurs. »