En décembre 2021, le projet LIFE in Quarries touche à son terme. Nous avons donné la parole au secteur extractif afin de faire le point sur ces 6 années passées… et sur toutes celles encore à venir.

 

Michel Calozet est l’administrateur délégué de FEDIEX, la Fédération de l’industrie extractive de roches non-combustibles, instigatrice du projet LIFE in Quarries

Nous avons pris le temps de revenir avec lui sur les leçons, les difficultés et les plus-values d’une telle expérience mais, aussi, sur tout ce qui peut encore être fait dans l’avenir.

 

La restauration de prairies fleuries et de prairies de fauche font partie des missions du projet. Photographie prise par Pascal Hauteclair (Natagora) dans une des carrières en activité membres du projet LIFE in Quarries.

 

Que retenez-vous des 6 dernières années (5 + 1 an de prolongation) ?

 

Énormément de choses mais je dirais qu’il y en a 2 qui sont essentielles.

La première c’est que nous nous étions fixés des objectifs ambitieux qui sont aujourd’hui tous remplis ! Ce projet était vraiment l’occasion d’innover et de nous dépasser. Nous ne voulions pas choisir la facilité. Et malgré ce cahier des charges osé, nous avons réussi à aller aux bouts de ce que nous nous étions fixés. Je suis très fier de ces accomplissements.

 

Nous n’avons pas choisi la facilité.

 

Et la deuxième, c’est que ce projet a permis de poser les bases d’une approche innovante et porteuse pour le secteur extractif dans son ensemble (et pas seulement pour les 26 sites concernés par le projet). Et attention, il ne faut pas croire que le secteur extractif a attendu jusqu’en 2015 avec le lancement du projet pour réaliser des actions en faveurs de la biodiversité ; ça fait des dizaines d’années que plusieurs de nos sites membres s’impliquent pour la préservation de la nature sur les sites dont ils dépendent !

Mais je dirais que le projet LIFE in Quarries a permis d’harmoniser ces efforts, de prouver qu’une collaboration avec des partenaires extérieurs au « monde des carrières » comme Natagora, des parcs naturels (comme le Parc naturel des Plaines de l’Escaut) ou des universités comme, dans le cas de ce projet-ci, avec la faculté de Gembloux Agro Bio-Tech (ULiège) est non seulement possible mais à encourager !

 

Michel Calozet, administrateur délégué de Fediex depuis 2008.

 

Si c’était à refaire, vous resignez ?

Directement ! Ce projet j’y ai cru et j’y crois toujours à fond.

 Je pense que devant une démarche d’une telle ampleur, c’est aussi le rôle de l’administrateur délégué, en tant que porte-parole du secteur d’être convaincu du dossier qu’il porte pour pouvoir faire passer son message. Et moi le message que j’ai envie de faire passer c’est que non seulement la biodiversité et les carrières en activité peuvent aller de pair, mais doivent aller de pair.

 

 

Quel mot utiliseriez-vous pour décrire la relation que vous souhaitez entre les secteurs d’activités industrielles et nature ?

(soupir)… Obligatoire ? Non, pas obligatoire mais… Je dirais que ça doit devenir naturel. Aujourd’hui on ne peut plus considérer le développement d’une entreprise sans le rapport qu’elle entretien avec son milieu et les impacts qu’elle exerce dessus. Et le secteur extractif a un impact, c’est évident. Mais, paradoxalement, c’est cet impact sur le paysage qui permet à toute une série d’espèces pionnières de trouver refuge ! Il y a donc du bon qui peut ressortir de ces « perturbations » et c’est ce qu’il faut développer. C’est cette manière de faire qui doit devenir « naturelle ».  Il faut faire rentrer ça dans nos gènes !

 

Parmi les nombreuses actions de nature permanente du projet on trouve l’éco-pâturage ! Photographie prise par Pascal Hauteclair (Natagora) dans une des carrières en activité membres du projet LIFE in Quarries.

 

 

Quelle aura été la plus-value pour le secteur d’un projet de type LIFE  ?

La première c’est qu’un projet de type LIFE est avant tout une démarche scientifique : on réfléchi, on teste des protocoles et on valide des processus minutieusement élaborés pour en dégager des outils simples, efficaces et appropriés qui permettent après de réaliser ces actions en faveur de la biodiversité à plus grande échelle.

L’idée c’est, par exemple, d’avoir un mode d’emploi de comment créer une bonne mare adaptée à telle espèce menacée de batracien que le secteur puisse s’approprier rapidement. C’est dégager des bonnes pratiques, rodées et approuvées scientifiquement.

 

On valide des processus scientifiques pour en dégager des outils simples, efficaces et appropriés

 

Ensuite je dirais qu’au bout de 6 ans, il y a une vraie relation de confiance et, même, de loyauté qui s’est créée avec des partenaires comme Natagora, le Parc Naturel des Plaines de l’Escaut ou la faculté de Gembloux (GxABT) avec laquelle on travaillait déjà.

Et c’est vraiment primordial parce qu’un projet d’une telle ampleur ne peut aboutir que quand un climat de confiance est établi. Aujourd’hui, que ce soit avec la Région wallonne, GxABT ou les autres, nous avons construit une vrai relation basée sur une confiance mutuelle et qui est destinée à durer !

 

Enfin, en dernier et même si je pense que nous prendrons mieux conscience des impacts positifs du projet sur le long-terme, on constate déjà une sensibilité accrue de la part du personnel des carrières (sensibilité qui existait déjà mais qui a été renforcée et est maintenant ancrée dans le quotidien des sites qui ont participé au projet).

 

Photographie prise par Pascal Hauteclair (Natagora) dans une des carrières en activité membres du projet LIFE in Quarries.

 

 

On reproche souvent au projets européens leur rigueur administrative, que diriez-vous aux autres secteurs industriels que cela pourrait décourager ?

Il faut se dire que l’Union Européenne établi des règles communes pour ses 27 états membres et que si la Belgique est un bon élève en faisant preuve de transparence et d’application ce n’est pas forcément le cas de tous les autres pays de l’U.E… Il est, donc, important de mettre en place un maximum de pare-feu pour être sûr que les subsides versés soient utilisés de manière efficace et appropriée. 

Je pense que ce que demande la Commission Européenne est 100% légitime et qu’il faut l’expliquer et insister là-dessus dès le début aux personnes et aux sociétés qui participent à ce genre de projet afin qu’elles comprennent qu’on ne leur demande pas tous ces documents pour rien !

 

Je pense que ce que demande la Commission Européenne est 100% légitime ! 

 

Oui, je comprends que ça soit « lourd » et que certains puissent se demander le bien-fondé de tous ces documents alors qu’on a que 24 heures dans une journée et qu’on s’en passerait bien mais, en réalité, ce n’est pas particulièrement chronophage et quand c’est devenu un réflexe ça roule tout seul…

 

 

 

Photographie prise parJacky Wuelche lors du recensement de larves de tritons Crêtés dans une des carrières en activité membres du projet LIFE in Quarries.

 

Et maintenant, quel avenir pour la biodiversité dans les carrières ?

 L’idée, maintenant, c’est de mobiliser toutes les bonnes pratiques et les outils qui ont été développés durant le projet pour, demain, permettre à un maximum de membres de Fediex de s’y mettre à leur tour. Il ne faut pas croire que les efforts du secteurs s’arrêtent avec le projet, au contraire ! Sans compter que les sites qui ont participé au projet se sont engagés à perpétuer les actions mises en place à travers une Charte.

 

« Oui on est sur les bons rails « 

 

Notre souhait, en tant que fédération, c’est de faire en sorte que le plus possible de nos membres  – mais, également des sociétés qui ne font pas partie de la fédération – s’engagent en faveur de la biodiversité au cours des prochaines années et que toute la charge de travail que les 26 sites pilotes ont portées durant 6 ans soit mobilisée pour permettre une meilleure gestion dynamique de la biodiversité dans les carrière et renforcer le lien entre notre activité économique et la nature.

Maintenant, il faut qu’on garde confiance en ce qu’on fait, en ce qui a déjà été fait et qu’on continue à porter ce message pour que nos membres se disent : « oui on est sur les bons rails » !

 

Photographie prise par Pascal Hauteclair (Natagora) dans une des carrières en activité membres du projet LIFE in Quarries.